C’était l’année de nos vingt ans. Nous avions encore nos rêves, et ce besoin de nous dépasser en pratiquant un sport parallèlement à nos études.
Au 4ème sous-sol du CROUS, dans une salle de sport consacrée également à l’escrime, un homme était assis là à sa table afin d’enregistrer les inscriptions. J’ignorais qu’il s’agissait de mon futur maître d’armes, Me Jacques Castanet. Il me demanda d’où venait ma motivation pour l’escrime. Je lui répondis de mon grand-père qui collectionnait des épées. Et que j’avais vu, une fois croiser le fer dans le salon de son appartement parisien, juste pour le plaisir. L’image était restée gravée dans ma mémoire d’enfant.
Maître Jacques Castanet n’était pas un transmetteur ordinaire, c’était également un homme de grande cuture. Il avait su nous enseigner l’humilité, le respect et le sens de l’effort avec une bonne humeur communicative, un zeste d’humour et une grande bienveillance. J’appris beaucoup à ses côtés tant sur moi-même que sur l’art et la manière de manier l’épée. Nous formions un groupe motivé, enthousiaste autour de lui, et partagions des moments conviviaux et inoubliables après les séances dans l’un des restaurants du quartier.
Les années passant, nous nous croisions, de temps en temps, sur les différents sites de compétitions d’escrime où il tenait son stand d’antiquaire « Jeanne-Élise d’Antan ». Un autre clin d’œil à mon grand-père, amateur et collectionneur d’objets anciens.
Je ne pouvais que lui dédier mon roman relatant l’histoire d’un sabre de légende, tout droit sorti de mon imagination. Ce fut l’occasion de découvrir nous partagions encore d’autres valeurs. Nous étions passés du « vous » au « tu ». La vie ne nous a pas permis de nous revoir. Et très étrangement, comme une intuition, ces derniers jours, je ne cessais de penser à ce maître à qui nous devions tant.
Aujourd’hui, je te pleure, mon Très Cher Jacques. Mais tu resteras éternellement dans mon cœur.